Pour les amateurs de voyage en train, sachez que la Tanzanie possède quelques lignes.
Un premier train fait le trajet nord-sud (Dar Es Salaam > Mwanza), mais on nous a fortement déconseillé de le prendre étant principalement un train de marchandise.
Par contre, le trajet est-ouest (Dar Es Salaam > Mbeya) est très fréquenté et très agréable. C’est la compagnie Tazara (Tanzanie > Zambie) qui dessert cette ligne tous les mercredis.
Le MV Liembe c’est un ancien navire de guerre qui a coulé et que les britanniques ont renfloué. Il permet de nos jours de traverser le lac Tanganyika dans toute sa longueur. Nous avons navigué sur le MV Liembe en mars 2011, ce qui s’est avérée être une «croisière» hors du commun.
Le MV Liembe fait la liaison entre les ports de Kigoma en Tanzanie et Mpulungu en Zambie sur la côte est du lac Tanganyika. C’est le deuxième lac le plus profond du monde après le lac Baïkal en Mongolie. L’embarquement se fait donc à Kigoma, mais faites attention, le bateau ne part qu’une semaine sur deux. Il faut donc bien se renseigner pour être sûr d’y être au bon moment.
De Dar es Salaam, la première étape est de se rendre jusqu’à Mwanza (18h de trajet), petite ville aux abords du lac Victoria. Même si on nous a recommandé la compagnie, on se retrouve dans un bus très rudimentaire. En fait, je pense qu’on nous a refilé le plus vieux et le plus mal entretenus de tous les bus disponibles. Le bus étant déjà quasi-complet, on s’est donc assis à l’arrière. C’est vraiment la meilleure idée à faire si on veut faire un tour de manège. Cependant, pour les longs trajets, c’est fortement déconseillé. À chaque dos d’âne, on sautait littéralement au plafond. Et en Tanzanie, des dos d’ânes, en veux-tu en v’la! Deux fois plutôt qu’une, à chaque entrée et sortie de village, une rangée de bosses nous attendaient de toute leur rondeur. Le pire c’est qu’on a l’impression d’être les seuls à profiter des bosses. Assez que le contrôleur du bus est venu s’asseoir à côté de nous pour nous conseiller de boucler notre ceinture très serrée. Après quoi, les forts sacres (jurons québécois) de Maxime ont diminués exponentiellement. Premier moment inoubliable de notre découverte de la Tanzanie.
Arrivée de nuit à Mwanza, on appréhende un peu la sortie du bus. Connaissant les rituels Tanzaniens, on s’attendait au pire groupe d’accueil. Et comme par hasard, ils étaient tous au rendez-vous. Sans même avoir mis le pied dehors, ils s’époumonaient tous d’un parfait anglais: Mzungu Mzungu, taxi taxi, my friend.
Le truc dans ce genre de situation
Le truc fonctionne si on est deux acteurs ou plus. Il vous faut au minimum un «grand parleur» et un «surveilleur» de sacs. Acte I, le grand parleur doit s’époumoner aussi fort que les autres tout en gardant un large sourire. Il entretient le small talk et tente d’accaparer toute l’attention sur lui. Pendant ce temps, le complice se charge de rassembler les bagages en soute et de se retirer à l’écart du groupe, en vue du grand parleur.
Sachant que les sacs sont en sécurités, on passe à l’acte II. Il vous faut choisir votre chauffeur. Le grand parleur a pu analyser la masse et il ne lui reste plus qu’a repérer la seule personne qui, soit le comprend vraiment, soit le respecte assez pour lui laisser un peu d’air. Il y en a toujours un, qui comprend qu’assaillir les touristes ça ne fonctionne pas.
Acte III, c’est la négociation. En Tanzanie, toute négociation se fait avec beaucoup de bruits et de grands gestes. Une vraie performance est nécessaire pour obtenir le meilleur prix. La destination comprise par votre élu et le prix maintenant fixé, le spectacle prend fin. Filez aussitôt et n’attendez pas le rappel.
Le lendemain c’est douze (12) autres heures de route de graviers qui nous attendent pour arriver à Kigoma. Ça reste tout de même plus agréable que la veille. Par contre, une sortie du bus est obligatoire pour effectuer un bout du trajet en ferry. Personne ne nous ayant prévenus, on ne comprenait pas trop ce qui se passait. La nuit encore noir, le bus s’arrête, tout le monde sort. Qu’est ce qu’il se passe ? On se regarde. Hein? D’accord, il faut acheter un ticket et monter dans un ferry. Hein!? Et nos sacs ? Rendu à bord, on nous a finalement expliqué que la route est plus rapide en passant sur le lac qu’en le contournant. Rassurés, on en profite donc pour prendre un petit-déjeuner à bord et assister à un magnifique lever de soleil. Puis, quelques instants plus tard, on remonte simplement dans le bus de l’autre côté du lac.
Un ami d’ami nous attend à la station de bus de Kigoma, le village au bord du lac Tanganyika d’où part le MV Liembe. Il travaille pour la Croix Rouge et a réservé nos tickets de bateau (seulement possible par téléphone). Il nous aide à trouver un hébergement sympathique et nous donne rendez-vous le lendemain pour aller récupérer nos tickets et nous faire découvrir les alentours. La petite ville a un rythme beaucoup plus lent que la métropole. Seulement un petit restaurant à touriste, où l’on retrouve probablement toute la communauté d’expatriés du coin, fait affiche d’activité citadine sur la rue principale. La bouffe est simple, mais bonne. En prime, sans menu réel, peu importe la commande c’est toujours une surprise qui arrive dans votre assiette.
Le lendemain, petite visite à Ujiji, village à quelques kilomètres de Kigoma pour y voir le monument érigé pour Livingstone, un explorateur écossais qui a contribué à la lutte contre l’esclavage. Le «musée» déçoit un peu, on en apprend plus en lisant sur le net. Mais l’ambiance du village, le sourire des gens et les longues discussions avec notre ami, en valait vraiment la peine.
Ce matin, on embarque finalement sur le MV Liembe et on est fébrile. Notre bateau de «croisière» va nous faire glisser sur les eaux du lac Tanganyika pendant trois jours et nous déposer à Kasanga, tout au sud, dernière ville juste avant la frontière de la Zambie. Sur le bateau, il y a six cabines première classe, c’est-à-dire privée pour deux personnes, avec un minuscule lit superposé. Dû à leur grande différence de prix (mais qui en vaut définitivement la peine), ils sont majoritairement tous occupées par des blancs. Parmi eux, on retrouve des Américains, des Suisses et un Canadien.
Première constatation, il n’y a pas de toilette dans la cabine et celles communes sont (comment dire gentiment?) tout simplement immondes. Que faire, on reste à bord pour au moins trois jours. Peut-être devrons-nous réinventer l’utilité du lavabo de la chambre? Plus tard, on découvrira une toilette salubre à l’étage, près de la cabine du capitaine. Le coquin! Autour de nous ça grouille et les gens tentent de trouver le plus rapidement possible un endroit pour s’installer à leur aise. L’ambiance est conviviale, la proximité est abondante et les sourires fusent de partout. Ça papote, ça rigole fort, tout le monde a hâte de partir. Le départ se fait en douceur, avec les fameux adieux de la main avec ceux qui sont restés à quai. La tranquillité des paysages défilent finalement au gré des flots, c’est partit!
Quelques heures à peine suffirent pour que la douce tranquillité à bord soit perturbée par les cris de nouveaux passagers qui s’amarrent à la paroi du bateau. Il faut savoir que sur le lac, il n’y a pas vraiment de port ou d’arrêt. Du coup, les barques «taxis» s’accostent à tout moment pour déposer ou prendre des voyageurs et de la marchandise. Au début ça surprend, mais rapidement on apprécie cette animation spontanée lors du trajet.
La petite cafétéria à bord du bateau, c’est le lieu tendance rendez-vous. On y joue aux cartes, on discute, on partage une bière et on se repose avec un bon livre. Dans toute sa simplicité, l’expérience à bord est unique en son genre. Un jour on entend un coq qui chante, le lendemain on constate l’ajout du poulet à toutes ses sauces sur le menu du jour. On apprécie la proximité, on s’observe, on s’amuse. Dans une certaine acceptation mutuelle, peu importe ses origines, on partage un court moment de voyage commun.
Après deux nuits bercé sur le bateau, rendu à destination, on retourne à l’arrache sur la terre ferme. On constate rapidement qu’on est arrivé trop tard, car la connexion avec le seul bus du matin est déjà parti. On va devoir se débrouiller autrement. Heureusement, on trouve rapidement des places à l’arrière d’un pickup. Quatre heures de route de graviers, ballottés dans tous les sens, ça change du rythme calme et zen passé sur le lac Tanganyika. Pensant être rendu à destination de Sumbawanga, le pickup nous fait débarquer au milieu de nulle part.
Merci! Mais on fait quoi maintenant?
Il n’y a presque jamais de tourisme dans ce village perdu et ça se voit. Tous les enfants s’approchent de nous, mais ils restent quand même à une certaine distance. Intrigués par nos habits, notre couleur de peau et notre langue bizarre, ils nous inspectent méthodiquement entremêlé de rires nerveux. Malgré toute l’attention qui est sur nous, ce n’est pas facile de trouver une solution pour sortir de notre nouvelle stagnation géographique.
Tout à coup, un camion arrive et semble s’arrêter au bord de la route. Notre jeune amie suisse était plus pressée que nous de partir d’ici et lui avait déjà fait signe de s’arrêter. Elle fait preuve d’une efficacité exemplaire, malgré la barrière linguistique. On peut finalement tous embarquer à l’arrière sur les sacs de grains de maïs. Parfait! Nous voilà repartis pour quatre heures de route jusqu’à Sumbawanga. C’est beaucoup plus agréable de rouler à du deux à l’heure. En toute quiétude, on admire le paysage rustique de la campagne sud de la Tanzanie.
À l’arrivée, on est parti pour l’apéro, resto et une petite nuit de sommeil en perspective dans cette communauté de travailleurs fort sympathiques. Bien bucolique, on sympathise aisément avec la population locale. Cependant, la fatigue du trajet nous rattrape et chacun retourne à ses quartiers plus tôt que prévu. On repart tous le lendemain matin, cette fois en bus, jusqu’à la prochaine destination, Mbeya. Sans y aller avec le dos de la cuillère, ce fût les pires huit (8) heures de bus de notre vie. Complètement compactés, avec aucune place pour les jambes, partageant les aisselles de vieilles dames à deux centimètres de nos visages, on tente par tous les moyens de prendre sur soi. On fait le vide, on se calme intérieurement et on attend avec impatience la fin du trajet.
Pour Alizé, c’était la deuxième fois à Mbeya. Elle savait donc, qu’il fallait être aux aguets. La dernière fois, de faux guides les avaient bien arnaquées. Surprise! Qui voilà à la sortie du bus, les deux mêmes joyeux lurons tout souriant qui essaient à nouveau de nous vendre toutes sortes d’activités. Tout le monde bien informé, nos deux menteurs ne comprennent pas trop pourquoi personne ne semble content de leur présence. Rien ne sert de traîner ici, on sort rapidement de la gare pour se diriger à pied vers le centre de la ville.
L’hôtel trouvé et les bagages déposés, on part à la recherche d’une agence de tourisme local recommandée. Celle-ci devrait être plus sûr pour organiser les randonnées des prochains jours. À ce qu’on dit, la région est propice aux activités de montagnes. Arrivés au lieu dit, en plein milieu de journée, l’agence est fermée à notre grande surprise. Heureusement, il y a un numéro de téléphone. On explique notre requête à l’homme au bout du fil: on désire partir en randonnée demain matin et notre horaire est assez limité. Pas de problème monsieur, je vous envoie quelqu’un.
Dix minutes à peine, un gentil guide arrive pour nous parler des randonnées possibles. Comme de bons touristes, on négocie un peu les prix. Sans gène, il nous propose assez vite de passer derrière le dos de son patron (l’homme au bout du fil) afin de nous faire un prix d’amis «rien que pour nous». Pas très sérieux tout ça, mais le prix qu’il offre est beaucoup plus acceptable. Rendez-vous donc demain matin à 8h à l’entrée de l’hôtel. En soirée, on récupère deux de nos compagnons de voyage pour se joindre à notre randonnée. Notre guide sera surement content de ce surplus monétaire.
Le lendemain matin, on débute doucement notre balade dans la campagne Tanzanienne. Petits chemins paisibles, petits villages mignons, le tout s’annonce des plus agréables. Selon notre guide, c’est une balade facile et plaisante. Le problème, c’est qu’assez rapidement on se rend compte que notre guide n’a pas l’air de connaitre le chemin. Il demande constamment les conseils aux personnes rencontrées sur la route. Puis, la route devient de plus en plus sauvage et on s’enfonce dans les hautes herbes. C’est quoi ce guide de merde! Il ne sait pas du tout où il va.
Après avoir perdu un temps fou à s’orienter, arrivés sur un des sommets, il se met évidemment à pleuvoir. Notre guide à l’air perdu, il ne sait pas quel chemin reprendre pour rentrer à l’hôtel. Heureusement, un gentil fermier nous indique le bon chemin qui nous mène beaucoup trop facilement au bas de la montagne. C’est une blague? Si on avait pris ce chemin à l’aller, on aurait pu profiter de la balade au lieu de galèrer comme des cons dans la jungle.
Après une courte discussion avec nos amis, on s’entend tous pour donner à notre guide que le prix de base pour deux personnes. Le supplément de nos deux amis, il ne le mérite pas. Il n’a pas du tout fait son boulot et tout le monde est complètement exténué d’une balade qui était soi-disant très facile. Max, comme à l’habitude, monte le ton, car le guide n’accepte pas notre nouveau prix d’amis. Mais rapidement, tout le village est attiré par la forte discussion. Constatant les dégâts, il s’excuse et accepte sans broncher le nouveau deal. En fait, il a surtout peur qu’on aille se plaindre à son patron.
Petite leçon de voyage, il est toujours mieux de passer par une agence qui a pignon sur rue. Il est encore mieux de se renseigner à son hôtel sur les agences recommandées. Vous réussirez peut-être, parfois, à sauver quelques dollars en trouvant votre propre guide, mais l’expérience risque d’être moins agréable. Que ce soit aux gares d’autobus ou avec n’importe quel passant dans la rue, mieux vaut organiser un tour avec des gens compétents et de confiance. Vous en pensez quoi?
En voyage vous préférez les agences ou vos rencontres spontanées?
Après cette petite aventure, on a envie de se faire plaisir. On l’a bien mérité! On décide de réserver un hôtel un peu plus luxueux dans l’une des exploitations de café de la région. Notre karma et notre bonne humeur est de nouveau des nôtres grâce à Utengulé Lodge, un coin de paradis pour les yeux et pour les papilles. On adore la bouffe et cette douce halte gustative tombe à merveille. Repos, balades et gastronomie sont au rendez-vous dans cet endroit magnifique. Idéal pour se remettre d’aplomb avant de prendre le train Tazara Express et rentrer à Dar es Salaam. Le budget est cependant vite explosé, on n’abusera pas des bonnes choses trop longtemps.
Pour la dernière ligne droite, on a réservé un wagon complet rien que pour nous deux. La différence de prix est minime et pour être tranquille dans la même cabine, ce n’était pas cher payé. Le trajet nous transporte à travers la savane et les villages typiques du sud de la Tanzanie. À chaque arrêt du train, une foule de vendeurs ambulants apparaissent de nulle part pour nous vendre fruits, biscuits, boissons, samosas et vitumbua (délicieux petits gâteaux de riz). Pour les locaux, il est même possible d’acheter un sac de pommes de terre, des poulets vivants et de la farine. Le vrai service!
On traverse également plusieurs parcs nationaux, d’où la possibilité d’admirer une panoplie d’animaux sauvages à même la fenêtre de notre cabine. Celle-ci est constitué de longues couchettes bleues assez confortable et permet de dormir bercé par le rythme constant du train. Le parfait bonheur, à l’exception près des énormes cafards qui sortent de leurs trous une fois la nuit tombée. Max se réfugie dans son sac de couchage, avec seulement le bout du nez qui dépasse, craignant les surprises nocturnes. Au petit matin, on vous apporte votre déjeuner en cabine. Copieux et curieusement pleins de saveurs pour une cuisine ambulante, on se fait vraiment traiter aux petits soins. Le voyage tire doucement à sa fin, peu à peu on ressent de plus en plus la chaleur suffocante typique de la métropole.
La Tanzanie ce sont des gens vraiment sympathiques et qui sont toujours prêts à vous aider. Outre les petites arnaques de chemin, c’est beaucoup plus sécuritaire que ce qu’on entend. La variété des paysages est tout simplement à couper le souffle. Des paysages rocheux du nord, par la pureté du lac Tanganyika jusqu’à la savane du sud, la Tanzanie possède un cachet séduisant.
Pour les commentaires, veuillez passer votre doigt/souris ici...